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Les Carnets d'Alcide

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Les articles d' Alcide Louis Naud


Spleen d'honneur

Publié par Alcide-Louis Naud sur 27 Décembre 2023, 14:51pm

Catégories : #Roman, #Charente-Maritime, #Saintonge

Ors, depuis la pierre pouille ou la Piare en saintongeais

Ors, depuis la pierre pouille ou la Piare en saintongeais

C'est avec plaisir que j'ai décider de reprendre du service ici pour partager l'avancement de mon roman. Je suis déjà bientôt à la moitié. Aujourd'hui donc je partage avec vous un extrait du premier chapitre que j'ai nommé: Spleen d'honneur. 

Bonne lecture chers amis et à très bientôt!😉

Elle désirait atteindre avant l’aurore, un tombeau face à la mer, son sanctuaire personnel : le dolmen d’Ors. Un endroit où les échos du passé résonnaient à travers les âges. La légende racontée par la voix de Christian, son grand-père, renaissait dans sa mémoire de petite fille :
« Dans le pays des Santons, la riche et puissante cité d’Anchoine prospérait à l’abri des courants marins. Le peuple écoutait attentivement la parole des druides et plus encore celle que les celtes surnommées « les fadas ». Elles avaient le pouvoir de transmettre les messages entre les hommes et les dieux. L’une d’entre elles, prénommée Myrghèle, habitait une cabane dans la grande forêt, un endroit mystérieusement envoûtant, rempli de murmures et de secrets chuchotés par les arbres. Elle était amoureuse secrètement d’un jeune guerrier, un héros au cœur vaillant, dont la bravoure faisait trembler les ennemis. Le jeune garçon resta insensible à ses avances. Il lui avoua qu'il était fiancé à Sylvane, la fille d'un pêcheur, dont la beauté était telle qu'elle faisait pâlir les roses au printemps. Mais Myrghèle, apprenant l'existence de cet amour, se mit à vouer une haine farouche et terrible à l'encontre de la demoiselle. Le jeune guerrier s'apprêtait donc à épouser la plus belle fille d'Anchoine, un destin promis sous le ciel étoilé. Or, Jules César, ancien allié du peuple Santons, ordonna à son armée d’envahir tous les territoires de la Gaule, et l'ombre de la guerre s'étendit comme un nuage menaçant au-dessus de la cité. La panique s'empara de la population entière qui demanda aux druides le secours des dieux. Ils invitèrent « la Fada » lors d'un grand conseil, où les voix sages résonnaient dans la nuit étoilée.  Myrghèle saisit alors l'occasion d’éliminer à jamais sa rivale. Elle prétendit que les dieux exigeaient un sacrifice pour sauver la cité et qu’il fallait, pour s'octroyer la protection des dieux, le sang de la plus belle vierge de la tribu. Lorsque la pleine lune fut venue, Myrghèle commença la cérémonie. Sylvane, allongée sur la grosse pierre plate, attendait son funeste destin, devant toute la tribu réunie, ses yeux débordant de naïveté et d’espoir. Alors que la lame transperça la jeune femme, un orage éclata. Un terrible vent violent et un raz de marée détruisirent Anchoine, emportant avec eux toute l’espérance des habitants. Ainsi naquit le mauvais chemin pour séparer Oléron du continent. Seule subsiste encore la grosse pierre plate, souvenir de la punition des dieux pour le mensonge de Myrghèle. »

Elisabette retrouva un sol ferme en sortant du marais et rejoignit le petit pont. Il ne lui restait plus qu’à monter en direction de l’ancienne cale à bateau, abandonnée depuis la création du Viaduc, pour prendre le sentier juste en face. Là-haut, au bout du grand chemin blanc, c’était la fin de son parcours.
Là… Enfin !
Une troublante vision l’arrêta au milieu du chemin. 
Myrghèle !? La Fada !?…

 

Sa bouffé d’angoisse lui joua du tambour. Les palpitations couvraient l’instant de silence d’une tension paralysante. Chaque seconde devenait une éternité. Sous la clarté blafarde de la lune, des contours indistincts se mêlait à l’environnement. Une ombre se déplaçait vers la grosse pierre, en suivant un phare lumineux.
Non ! … Ça n’existe pas….

Surmontant un peu sa peur, Elisabette se précipita vers l’éperon rocheux qui protégeait le site historique de la mer. Après le petit parking, elle grimpa silencieusement jusqu’aux frontières du réel.
Une fois en haut, elle se déroba, à pas de loup, pour s’enserrer loin du dernier lampadaire, entre les deux troncs d’arbre. Visiblement de forme féminine et armée d’une grosse lampe torche, la silhouette se déplaçait sous une longue parka noire, en crissant légèrement à chaque pas. 
Le fantôme porte des bottes en caoutchouc ?!

Aux pieds de la ruine néolithique, l’étrange dame dans son imperméable usé par le temps éteignit et posa son éclairage au sol. Elle joignit les mains contre sa poitrine. La capuche glissa lentement sur ses épaules menues, révélant ainsi de longs cheveux cendrés, en bataille, qui tombaient en désordre autour de son visage.
Elisabette aperçut les lunettes noires.  À cet instant précis, un frisson parcourut l’échine de l’adolescente lorsqu’elle reconnut le mystérieux personnage. 
 C’est la vieille de Vertbois !

« La sorcière », nommé ainsi par les enfants de l’île, avait élu domicile dans un des blockhaus, sur la grande plage. Simple employée ostréicole, pour remplir son maigre revenu, elle pratiquait la pêche à pied et revendait les coquillages aux connaissances du coin.
—    Asteur ! Tu crois qu’je’te vois pas ?
La jeune fille en reculant percuta un objet avec son talon. Un panier en métal grillagé contenant une griffe et un piolet.
—    Qué toue qu’t’bouines ? (Qu’est-ce que tu fais ?) Donne-zou l’panier !
Elisabette se pencha pour ramasser les outils. La femme insista en tendant sa main recouverte de crevasses :
—    Dépêche-toi nigaude ! J’ai des sourdons à ramasser !
Toute tremblante, l’adolescente allongea son bras pour lui remettre son panier. La sorcière exprima un léger ricanement. Avant de s’éloigner vers le chemin qui descendait sur la baie elle déclara :
—    Passe une bonne journée, ma drôlesse !

La brume se dissipa avec le départ de la vieille dame. Elisabette s’approcha à son tour de la grosse pierre. L’aurore déchirait le voile de la nuit tout en révélant graduellement le paysage endormi. Les lumières urbaines le long des côtes maritimes s’éteignirent d'un coup, enveloppant le monde d'une douceur apaisante, comme si la nature elle-même reprenait son souffle. 
 

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